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mardi 23 juillet 2024

« L’abolition des privilèges » au Festival d’Avignon.

 

« L’abolition des privilèges » au Festival d’Avignon. L’Insoumission.fr publie un nouvel article de sa rubrique « Nos murs ont des oreilles – Arts et mouvement des idées ». Son but est de porter attention à la place de l’imaginaire et de son influence en politique, avec l’idée que se relier aux artistes et aux intellectuels est un atout pour penser le présent et regarder le futur. En ce mois de juillet 2024, L’insoumission est en direct du festival d’Avignon.

Hugues Duchêne nous fait revivre un moment fort de la première année de la Révolution française. Le vote, à l’Assemblée, de l’abolition des privilèges. La nuit du 4 août 1789. C’est une nuit parlementaire comme il y en a peu dans le monde. De 19h à 2h du matin. Le vieux monde se fissure et s’écroule. Pan par pan. Notre article.

« Pour enchaîner les peuples, on commence par les endormir ». Jean-Paul Marat

C’est une nuit parlementaire comme il y en a peu dans le monde. De 19h à 2h du matin. Le vieux monde se fissure et s’écroule. Pan par pan. Dans un immense potlach. Les privilèges tombent.  Les privilèges de l’aristocratie. Les privilèges des régions et des villes. Les privilèges du clergé . La dîme et tous les impôts. Tous les droits personnels et réels. Les justices seigneuriales. Les colombiers. La vénalité des charges. Les privilèges des villes et des provinces. Le droit de chasse exclusif de la noblesse. Les corvées et servitudes…  Abolis. Remplacés par le droit pour tous d’exercer des charges publiques et l’impôt universel en fonction des revenus. Un système remplace l’autre. Surgit une Nation.

Saint Just Osez ! ce mot renferme toute la politique de notre révolution.

Bertrand Duchêne a décidé de nous faire revivre cette nuit. D’après le texte de Bertrand Guillot. Le public en se rendant dans la salle s’expérimente. Venus des quatre coins de la France. On reconnaît des accents. On découvre un dispositif quadri-frontal. Comme l’Assemblée de 89. Bertrand Duchêne nous accueille. On s’assoit avant de découvrir qu’une tribune est réservée au clergé. Deux au Tiers-Etat. Une dernière à la noblesse. Les chanceux de tribune ont le privilège de recevoir une coupe de pétillant. On vit l’arrivée des députés retardataires. En direct comme si cela se passait maintenant. Et ça démarre.

C’est une nuit folle. Unité de temps et de lieu. Accélération prodigieuse de l’histoire.Le comédien Maxime Pambet nous y embarque. Minute après minute. Un conteur endossant tous les rôles.  L’avocat Duquesnoy et l’armateur Delaville Le Roulx,  députés du Tiers-État. Le président de l’Assemblée, Le Chapelier. Talleyrand, alors simple député du Clergé. Et les orateurs dont le libéral vicomte de Noailles et le fortuné duc d’Aiguillon.  Le paysan breton Le Guen de Kerangal.  Le président de l’Assemblée, Le Chapelier. Entre autres. Un tourbillon d’une dizaine de  personnages. Plus le public en Assemblée et certains spectateurs endossant l’Histoire. Le Vicomte de Noailles lance la proposition d’abolition de privilèges. Effervescence et bouillonnement. Une surenchère d’abandons. Une débauche d’abdications, de largages et de renoncements. Souvent sous conditions. Comme une mer attaque un château de sable. On en comprend la portée historique. On en comprend l’impact. On en comprend la force. Pas forcément les raisons. C’est voté.

Seconde partie du spectacle. Flash-back des années précédentes. La  révolution vient de loin. On se rappelle Rousseau dans l’Émile, en 1762, « nous approchons, de l’état de crise et du siècle des révolutions ; qui peut répondre de ce que vous deviendrez alors ? » Et Voltaire, le 2 avril 1764 : « Tout ce que je vois jette les semences d’une révolution qui arrivera immanquablement »

Le narrateur raconte un peuple qui crie famine dans un pays riche. La Grande Peur. Une crise économique et climatique. Des riches qui s’enrichissent et échappent à l’impôt. Un pouvoir impuissant, un déficit budgétaire et une dette importante et des remaniements gouvernementaux qui s’enchaînent. Des révoltes récentes – traités comme des faits divers. Prises d’assaut, occupations et incendies de châteaux. Tout chemine vers la Révolution. Même si rien n’est inéluctable et que tout aurait pu être autre. Troisième partie l’après. Un monarque qui bloque l’application de la loi et joue la montre.

De la fin des privilèges du clergé découle la revente de ses propriétés devenues bien nationaux. Constitution foncière d’une bourgeoisie pour apurer les dettes du royaume. Des décrets d’application qui viennent à compte gouttes en fonction de la pression populaire et parlementaire. Il faudra attendre le 17 juillet 1793 pour l’abolition définitive de toutes les redevances féodales et la destruction des titres.

Discours de M. le Vicomte de Noailles : « Le but du projet d’arrêté que l’Assemblée vient d’entendre est d’arrêter l’effervescence des provinces, d’assurer la liberté publique, et de confirmer les propriétaires dans leurs véritables droits. Mais comment peut-on espérer d’y parvenir, sans connaître quelle est la cause de l’insurrection qui se manifeste dans le royaume ? Et comment y remédier, sans appliquer le remède au mal qui l’agite ? (…)

 Comment l’espérer, cette tranquillité ? En calmant le peuple, en lui montrant qu’on ne lui résiste que dans ce qu’il est intéressant de conserver. Je propose : Qu’il soit dit, avant la proclamation projetée par le comité, que les représentants de la Nation ont décidé que l’impôt sera payé par tous les individus du royaume, dans la proportion de leurs revenus ; Que toutes les charges publiques seront à l’avenir supportées également par tous ; Que tous les droits féodaux seront rachetables par les communautés, en argent ou échangés sur le prix d’une juste estimation, c’est-à-dire d’après le revenu d’une année commune, prise sur dix années de revenu ; Que les corvées seigneuriales, les mains-mortes et autres servitudes personnelles seront détruites sans rachat. »

« Si la femme a le droit de monter sur l’échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune. «  Olympe de Gouges

On comprend ce qui a intéressé Hugues Duchêne dans l’ouvrage de Bertrand Guillot. Une fin d’Ancien régime. Le passé pour mieux comprendre le présent. Et construire l’avenir. Une mise en abîme d’un siècle à l’autre. Presque 250 ans après, la ressemblance des périodes. Il nous l’indique dans des intermèdes au plateau de dialogues au présent avec l’acteur Maxime Pambet. Le contexte d’inégalités, de racisme systémique et de crises. Des institutions qui ne tiennent plus. Un peuple qui doute de la représentation. Qui cherche sa voie pour être pris en compte. Un Macron monarque absolutiste.Quels seraient les privilèges de classe, de sexe, de genre, de couleur… à abolir aujourd’hui. ?  Pourquoi la révolution ne vient-elle pas ? Une mise en abîme d’un siècle à l’autre. Dans notre actualité brûlante. Amenée à s’aiguiser. Et se se prolonger.

« Si les révolutions sont de toute nécessité dans l’économie de l’univers, les malheurs qui les accompagnent ne sauraient être un argument contre elles. Il faut en accuser ceux qui résistent à la nécessité bien plus que ceux qui en sont l’instrument. Il faut rejeter ce sang et ces larmes sur ceux qui s’arment pour l’oppression, non sur ceux qui combattent pour la justice ». Albert Soboul historien

« La loi est-elle l’expression de la volonté générale lorsque le plus grand nombre de ceux pour qui elle est faite ne peuvent concourir, en aucune manière, à sa formation ? Non »  Maximilien Robespierre

Un spectacle ne fait pas la révolution. Ni ne peut dire ce que chacun doit penser. Abolition des privilèges » de Hugues Duchêne fait le plein à Avignon. Signe de vitalité du débat politique actuel ? On peut le penser.  Du point de vu de l’imaginaire et des idées convoqués, Comme des débats qui suivent la représentation.  Moment privilégié d’éducation populaire. Le spectacle sera en tournée dans toute la France.

Sources:l'insoumission.fr  :Par Laurent Klajnbaum











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